Entretien avec Emmanuelle Nagel, fondatrice et directrice de la marque Paule Vasseur

« J’avais 4 ans lorsque j’avais commencé à coudre. J’observais ma grand-mère qui était première main dans la haute couture. Le début du prêt-à-porter avait marqué la fin de cet élan de couture sur mesure. Je me rappelle que durant mon adolescence, on allait avec ma grand-mère choisir de beaux tissus, avenue des Champs Élysées et au marché Saint-Pierre. Mon grand-père et mon père étaient tailleurs. J’avais baigné dans une famille de couturiers. C’était surtout ma grand-mère qui m’avait donné le goût des belles matières ainsi que du travail rigoureux et très bien fait.

J’avais commencé ma carrière en tant que chef de produit. Je m’occupais des interfaces entre les ateliers, la production, les ateliers de collection et les stylistes. Je supervisais les collections de plusieurs marques de grands groupes textiles. C’était aux côtés de grands stylistes et de grands ateliers de production française que j’avais appris la rigueur de la création, de la mise au point des modèles et de la fabrication de qualité. J’avais à peine 27 ans lorsque je dirigeais déjà plus de 20 collections simultanément. J’étais une working girl très hyperactive.

J’avais l’occasion de pouvoir créer ma propre marque dans les années 90. Ma collection s’était retrouvée en première place dans toutes les boutiques Victoire de France. Les boutiques Victoire étaient une référence dans le prêt-à-porter haut de gamme de l’époque.

Mes collections étaient rapidement en vitrine au bon marché pendant les fêtes de Noël, puis chez Franck et fils, rue de Passy, et dans toutes les meilleurs boutiques de prêt-à-porter haut de gamme français. Mes collections étaient exposées dans des boutiques en Angleterre et aussi aux États-Unis. Ma marque était présente dans plus de 600 points de vente, majoritairement à l’étranger. En 2006, j’avais reçu le premier Prix du gouvernement pour la première société française exportatrice à l’étranger. On exportait à l’époque 95 % de notre production.

Je rencontrais un énorme succès jusqu’au crash boursier de 2008. Après plusieurs rebondissements, j’avais préféré me concentrer sur ma collection en France et travailler en exclusivité sur un produit de haute qualité avec des tissus précieux. Ma marque était connue pour ses modèles aux couleurs chatoyantes, fabriqués sur mesure pour les grandes occasions.

Mon entreprise avait beaucoup subi, notamment après les attentats puis les grèves et, pour finir, après la Covid-19. Néanmoins, grâce à mon site internet, très visité et une très bonne réputation qui suit ma marque depuis 25 ans, les clientes continuent à visiter nos 6 points de vente qui représentent parfaitement la marque.

Malgré cette grande période de crise, ma marque a survécu. Les créations suivent les saisons et ma clientèle ne diminue pas. »